Tous des glandeurs!?Clés pour comprendreGestes pratiques

7 novembre 2013

« Ils gagnent plus que moi qui travaille! Quand on veut, on peut! L’Etat est trop généreux! » Des petites phrases, incisives, cassantes, qui se glissent au cœur des conversations, qui se lancent au gré des contestations. Des insinuations pourtant dénuées de sens. Un chômeur est loin de mener la vie de luxe et de fainéantise que laissent sous-entendre ces affirmations. C’est ce que veut montrer la campagne « Tous des glandeurs !? » Indispensable à une époque où les amalgames prennent malheureusement le dessus sur la prise de conscience des injustices sociales. Faites passez le mot, déconstruisez les idées reçues !

« Quand le travailleur d’Arcelor-Mittal ou de Ford Genk perd son emploi, il fait à juste titre l’objet des plus vifs soutiens de la population, très souvent solidaire. Mais que pensera de lui cette même population six mois plus tard ? », interrogent très justement Présence et Action Culturelle (PAC) et les Equipes Populaires (EP). Ces deux mouvements d’éducation permanente mènent actuellement une campagne de sensibilisation contre la stigmatisation des chômeurs. Avec « Tous des glandeurs ?! », PAC et les EP veulent combattre une vision simpliste et dangereuse : les travailleurs seraient divisés entre les bons (« ceux qui se lèvent tôt ») et les mauvais (« ceux qui glandent »).

Le journal papier « Tous des glandeurs ?! », bien conçu, didactique et engageant, est disponible au siège des Equipes Populaires ou dans l’une des 9 régionales . A découvrir et à faire passer, surtout auprès des « non conquis », histoire de sortir de la bulle des « déjà sensibilisés et convaincus »! Et pourquoi pas l’utiliser comme outil de sensibilisation, avec des élèves de secondaire ou des groupes d’adultes…

« Tous des glandeurs ?! » propose des outils – un journal papier et un site internet – permettant de casser l’image unique du chômeur. On y découvre notamment les portraits de Philippe 43 ans (« La difficulté de vivre sans projet, sans certitude »), Maryne 20 ans (« On se fait rarement un plaisir. On se prive tout le temps »), Sylvie 43 ans (« L’être humain vit dans un groupe. Hors du travail, ton groupe se réduit. On t’enlève une part d’humanité ») et quelques autres personnes sans emplois. Les porteurs de la campagne expliquent cette démarche : « En partant à la rencontre d’une dizaine de témoins, ce sont au contraire des réalités bien différentes que nous avons voulu faire percevoir. Chaque chômeur a son histoire, ses accidents de vie, son parcours singulier. Le chômeur, c’est peut-être moi demain. Ou c’est moi hier. C’est mon fils ou ma fille. Mon meilleur ami ou ma voisine. »

Dans le journal et sur le site, on trouve aussi une série de stéréotypes déconstruits par des personnalités des mondes associatif et syndical. Ils répondent, concrètement et avec poids, à des idées reçues, couramment entendues et répétées, comme « Les chômeurs sont trop payés » (lire extrait ci-dessous) ou « Le chômage c’est la faute aux étrangers ».

Des pistes d’actions pour changer la donne sont également proposées et détaillées. Sur le site internet, un espace permet aux internautes de s’exprimer, de témoigner eux aussi de leur situation. Et des activités sont organisées. La prochaine aura lieu le 15 novembre : une conférence-débat à Verviers.

Céline Teret

Extrait:

« ILS SONT BEAUCOUP TROP PAYES! »

par Denis Desbonnet, journaliste au Collectif solidarité contre l’exclusion

Ce préjugé est archi-répandu, on l’entend régulièrement dans les conversations.
Il est évidemment impossible de reprendre ici l’ensemble des diverses allocations que perçoivent les chômeurs et les chômeuses, dans une réglementation très complexe, avec des barèmes dépendant de nombreux critères : passé professionnel, durée du chômage, situation familiale, etc.
Aussi, nous ne citerons donc que quelques chiffres, illustratifs de la nouvelle législation, bien plus restrictives quant à leurs conditions d’octroi, leur montant et leur durée.

La réglementation de l’ONEm distingue fondamentalement trois catégories de chômeurs, lesquels perçoivent des allocations plus ou moins importantes, selon celle à laquelle ils appartiennent. Par ordre décroissant : les « cohabitants avec charge de famille » (anciennement « chefs de famille »), les « isolés », et les « cohabitants ». De plus, en fonction de cette dégressivité dans le temps, le montant des allocations évolue à la baisse au cours de trois périodes : la première de 12 mois, la deuxième du 13ème au 48ème mois, et au-delà, la troisième, où un forfait minimum est désormais d’application générale.

Certains de ces montants initiaux peuvent sembler importants, relativement aux revenus de beaucoup (trop) de salariés. Mais tout d’abord, le scandale réside justement dans les salaires scandaleusement bas de ces travailleurs, et non dans ces allocations de chômage « maximales »… mais très marginales. Car, disons-le clairement : celles-ci ne valent que pour une minorité de chômeurs et chômeuses, qui en bénéficient légitimement en raison de toute une série de critères objectifs : leur statut de « chefs de famille », et/ou leur longue carrière, un salaire important pour le dernier emploi, etc.

De plus, pour chacune des trois catégories, les allocations initialement à un taux plus élevé commencent à plonger dès le quatrième mois, et continuent ensuite à le faire inexorablement : après un an, après deux ans, etc. Qui plus est, pour la grande majorité de chômeurs ne touchant que le minimum, c’est dès le premier mois qu’ils perçoivent tous un forfait « plancher »… sauf pour les cohabitants, encore plus discriminés, dont le forfait initial de 700,44 € va encore diminuer graduellement, jusqu’à aboutir en troisième période à un montant de 493,74 € !

(…) Nul besoin d’être économiste ou assistant social pour comprendre qu’avec de tels moyens, pas même de subsistance, il est impossible de mener une vie décente. Toutefois, afin de matérialiser un peu mieux le régime de famine que cela signifie pour ceux à qui il est imposé, rappelons que ces montants sont, dans tous les cas de figure, inférieurs au seuil de pauvreté. En effet, en 2013, celui-ci était établi pour la Belgique à 973 € mensuels pour un isolé, et à 2.101 € pour un ménage de deux adultes et deux enfants. On voit immédiatement que l’on est loin du compte…

> lire l’entièreté de ce texte via le site ou le journal papier de la campagne « Tous des glandeurs?! »

En savoir plus :

  • Le site de la campagne : www.tousdesglandeurs.be
  • Les Equipes populaires : 081 73 40 86 – www.equipespopulaires.be
  • Présence et Action Culturelles : 02 545 79 11 – www.pac-g.be
  • Egalement dans le cadre de cette campagne, le livre Chroniques du No Jobs Land : recueil de 12 témoignages en quête d’emploi, de Laurence Delperange (texte) et Christophe Smets (photo), éd. Équipes populaires-PAC.
 En vente auprès des Équipes populaires et de PAC au prix de 8€.

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