L’environnement sous l’arbre à palabresReportages

12 octobre 2005

Au Burkina Faso, dans la brousse, des défenseurs de l’environnement redoublent d’imagination pour apporter aux populations les clefs d’une bonne gestion de leur milieu. Immersion.

village doriDès potron-minet, la campagne burkinabé s’anime de silhouettes élancées. Un seau en plastique coloré sur la tête, des femmes et des fillettes cheminent vers le puit. Dans les champs, des villageoises se courbent sur leur terre. Bientôt, le soleil sera haut enveloppant la brousse d’une vague de chaleur humide. La saison des cultures bat son plein. Partout, le vert cru des cultures tranche avec le rouge de la terre burkinabé.
À Kaya, au centre du pays, sur le moutonnement des collines, des buissons d’épineux viennent aussi rappeler que le pays est particulièrement sec. L’eau vient régulièrement à manquer et dans ce pays où 92 % de la population dépend de l’agriculture, le moindre déficit hydrique peut prendre des dimensions catastrophiques. D’autant que le désert avance, à la faveur des changements climatiques et du déboisement. Dans ce pays pauvre, classé au plus bas dans l’indice de développement humain, le bois reste le premier combustible, utilisé par 84 % des ménages. La maîtrise des ressources représente de véritables enjeux qu’il faut relever en brousse, avec les villageois… et les villageoises en particulier, premiers travailleurs au champ comme à la maison, utilisant l’eau pour la culture et le bois pour le repas.
Les campagnes de sensibilisation environnementales débordent d’ailleurs souvent de leur cadre pour s’étendre à l’ensemble des composantes de la vie des femmes.

Images chocs

enfants burkina« Beaucoup de femmes sont analphabètes, constate Jean-Pierre Tarpaga, animateur au sein de l’association des Femmes pour la Régénération du Sahel (FERES), qui s’attache à améliorer l’ordinaire des femmes tout en leur donnant des clefs pour gérer au mieux leur environnement (1). Les brochures sont inutilisables. Nous utilisons une palette d’outils adaptés à notre public. Notamment des cassettes vidéo, qu’on projette sur une petite télé : des images fortes sur les grands problèmes environnementaux dans les campagnes burkinabés, sur les questions du sida, des mariages forcés ou de l’excision ». La problématique la plus abordée ? La coupe abusive du bois. Jean-Pierre projette alors un film qui démarre sur une forêt, très dense, mais qui se dégrade au fil des abattages, pour se chauffer, cuisiner, revendre du charbon de bois, nourrir le bétail, braconner en milieu plus ouvert… Et la forêt de se réduire comme peau de chagrin. « Après la projection, on discute avec les femmes, poursuit l’animateur. On s’explique en Mossi, la langue nationale. La plupart du temps, les paysannes réalisent très vite que non seulement il y a un problème grave, mais aussi qu’elles en sont à la source. La voie est alors tracée pour réfléchir ensemble aux alternatives permettant de répondre à leurs besoins tout en préservant leur environnement. »

Spectacle vivant

La télévision cède cependant du terrain, face à une nouvelle technique d’animation très utilisée dans les villages. Le théâtre forum. Ce divertissement organisé met en scène des historiettes autour d’un thème sujet à débat : scolarisation des filles, érosion des sols, etc. . Comment réagit le public ? « Les gens participent volontiers à nos actions, reprend l’animateur. Mais, il y a aussi des réticents, ceux qui nous disent “Ah, mais ça, c’est un faux problème, « nous sommes nés-trouvés » (ça fait partie de la tradition) !

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