Embarquement immédiat pour MondiapolisReportages

24 mai 2006

Comment rendre compte des « effets pervers de la mondialisation économique et des alternatives possibles » par une approche pédagogique percutante? Tentative de réponse avec un atelier d’immersion initié par Oxfam-Solidarité.

Le temps n’est pas particulièrement clément en cet après-midi de février aux « Etangs noirs » à Molenbeek. Si les participants s’attendaient à trouver un peu de chaleur et de douceur dans les locaux des Carrefours du Monde, c’est loupé ! Les voilà plongés au cœur des mécanismes froids et implacables de la mondialisation économique, pour 3 heures non-stop.

Un groupe remuant composé d’élèves du secondaire supérieur technique de l’Institut de la Providence de Woluwe-Saint-Lambert prend place. Ils participent à l’atelier Mondiapolis, halte dans un voyage thématique et interdisciplinaire d’une semaine sur l’océan de la consommation. L’embarquement pour « Mondiapolis » est imminent. Au préalable, une phase d’échauffement permet de savoir si les participants sont « mondialisés ». Pas de doute en la matière, la majeure partie du groupe répond oui à plus de 10 des 15 questions posées : ils ont déjà mangé des kiwis, connaissent l’anglais, regardent des émissions sur des chaînes étrangères… Une façon de connaître leurs représentations et attitudes initiales.

C’est quoi une multinationale ?

Première escale « cognitive » dans un centre commercial. Les élèves sont invités à piocher des informations sur les firmes multinationales. Une fois ces informations collectées, courte récapitulation en cercle. « Période d’apprivoisement pour responsabiliser et non culpabiliser les participants » pour l’animatrice qui ne se laisse pas abattre par la fronde des dissidents dissipés et renchérit à coups de chiffres et de questions rhétoriques : « Saviez-vous que Mac Donald’s est présent dans 121 pays ? » « Quelles stratégies ont les firmes multinationales pour augmenter leurs bénéfices ?» Réponses en ordre dispersé : « Euh des vendeurs gentils ça peut faire augmenter leurs bénéfices, non ? » Mais encore ? La définition se construit ensuite progressivement grâce aux apports et questions de chacun. L’intérêt peut jaillir inopinément : « À un moment donné y a pas un stop à la croissance des entreprises ? » L’exaspération pointe aussi le bout de son nez face à la complexité et aux bouleversements induits par un système mondialisé : « On a qu’à dire merde aux règles de l’OMC et à tout ça ! ».

Une excursion déroutante

Changement de pièce et de décor. La seconde escale veut davantage emmener les élèves sur le terrain « affectif », avec à la clef une arme incontournable : le jeu de rôle. Immersion. Nous sommes soudain au Nicaragua. Les ouvrières de Fortex sont en grève : « Chacun d’entre vous aura un rôle à jouer face à cette grève, vous serez les représentants des différents mouvements qui prendront part aux négociations ». Une fois leur « carte d’identité » en main, les élèves sont invités à « trouver des informations sur leurs personnes ». « Non, mais c’est un truc de malade ! » s’exclame une élève déconcertée et dépaysée en pénétrant dans les maquiladoras et les ateliers reconstitués pour l’occasion.

L’heure tourne. Quand il s’agit de conclure sur un petit geste à faire pour mieux consommer, la motivation n’est pas palpable. Des idées éparses fusent, proposant « un salaire égal pour tous » tandis que d’autres rétorquent « ça ne serait pas forcément plus juste pour ceux qui travaillent plus ».

Contrer la politique de l’autruche

Dans cet atelier d’immersion, il s’agit avant tout de montrer l’importance d’agir et que chacun a la capacité de le faire. Même si nous ne sommes qu’une goûte d’eau… Dans cette optique, l’animatrice (dé)montre les mécanismes qui lient le Nord et le Sud, tout en mettant l’apprenant au centre de son apprentissage. La « conscientisation » y est vue comme un préalable à toute action transformatrice ou « aux changements de mentalités et de politiques dans le Nord qui contribuent à favoriser des changements structurels profonds dans le Sud ».

Alors tenté(e)s ? Sachez que depuis janvier 2006, un projet pilote propose également aux professeurs et élèves des activités de suivi (scolaires et extrascolaires) afin de sonder leurs aspirations aux changements à la suite de cette excursion alternative. Alors que restera-t-il de cet atelier d’immersion pour les élèves de l’Institut de la Providence ? Difficile à vérifier. Pour sa part, l’animatrice concède que « 3 heures d’animation ne vont pas permettre le changement puisque celui-ci n’est pas urgent pour les élèves. C’est vraiment un travail de longue haleine ». Le lendemain de cet atelier, une partie du groupe a dégusté un petit-déjeuner « équitable » dans le cadre de cette semaine scolaire consacrée à la consommation et sous intitulée « Le changement en douceur ». Espérons que les élèves resteront sur leur faim avec l’envie d’aller plus loin…

Hélène Mori,
Article publié dans la revue Symbioses, n°70

Contact : Oxfam-Solidarité – Carrefours du Monde – 56, Rue de la Colonne – 1080 Bruxelles – T: 02 501 67 12 – sarah.turine@oxfamsol.be
Basta : le site des Carrefours du Monde d’Oxfam-Solidarité avec « de l’info et des idées pour agir »

2 commentaires sur “Embarquement immédiat pour Mondiapolis”

  1. Céline dit :

    L’exposition se situe dans les locaux d’Oxfam Solidarité – Carrefours du monde – 56, rue de la Colonne – 1080 Bruxelles. Sur rendez-vous. Contact: 02 501 67 12. Toutes les infos pratiques via http://www.oxfamsol.be/fr/article.php3?id_article=386

  2. deceunynck dit :

    Ou se situe l’expo mondiapolis?
    Quel est l’horaire?
    Où se situe-t-elle?