Quel avenir pour l’altermondialisme ?Clés pour comprendre

26 février 2009

altermondialismeDans un contexte de crise financière évoluant vers une récession économique majeure, le mouvement altermondialiste perd petit à petit le monopole de la critique du néolibéralisme. Pour continuer à jouer un rôle dans le débat public, il doit donc apporter ses propres réponses aux diverses crises mondiales.

Lors de son apparition à la fin des années 90, le mouvement altermondialiste se profile comme un mouvement de résistance(s) globale(s) face à un adversaire commun et homogène : le néolibéralisme, incarné par les principales institutions financières internationales (Banque mondiale, Fonds monétaire international et Organisation mondiale du commerce). A la soi-disant absence d’alternative invoquée par les dirigeants des ces grandes institutions, les manifestants de Seattle, Gênes ou Barcelone répondent par un slogan chargé de sens : « Un autre monde est
possible ! »

Avec la naissance du premier Forum Social Mondial à Porto Alegre en 2001, le mouvement tente de se structurer et de mettre en forme les alternatives élaborées aux quatre coins du monde. Elargissant sa base, il parvient à accroître son impact auprès des opinions publiques et énonce ses premières propositions concrètes.

Défis à relever

Dès le départ, le mouvement altermondialiste se caractérise par une extrême hétérogénéité constituant à la fois sa force et sa faiblesse. Si la diversité d’acteurs et le mode de fonctionnement participatif séduisent, le mouvement peine toutefois à véhiculer un message clair. Si un « consensus altermondialiste » parvient à se structurer autour du refus de la marchandisation du monde, le mouvement est aujourd’hui confronté à plusieurs difficultés qui, prises ensemble, posent la question de son avenir.

Premier défi, et de taille : les logiques à l’œuvre au sein de la mondialisation néolibérale n’ont pas connu de véritable renversement avec l’apparition des revendications altermondialistes. Une réalité qui, pour beaucoup, pose inévitablement la question de l’utilité du mouvement, de son efficacité politique. Ce constat ne doit toutefois pas faire oublier deux avancées majeures à mettre au crédit du mouvement alter. D’abord, avoir créé des plate-formes où citoyens et peuples peuvent échanger leurs expériences. Le Forum Social Mondial reste à cet égard un exemple d’autogestion et de démocratie participative particulièrement riche et encourageant. Ensuite, avoir brisé l’unanimité qui entourait les principales institutions financières internationales (IFI). L’OMC a connu des oppositions très fortes dans sa volonté de généraliser le libre-échange et ne parvient pas à conclure le cycle de Doha. Les plans d’ajustement structurels du FMI et de la Banque mondiale ont mené de nombreux pays à la catastrophe et connaissent également une crise de légitimité. Les logiques à l’œuvre ont été dévoilées. Reste aujourd’hui à définir clairement le type d’architecture internationale que le mouvement altermondialiste appelle de ses vœux.

Second défi, paradoxal, pour le mouvement : la crise de légitimité de l’idéologie néolibérale. Face à la multiplicité des crises actuelles (alimentaire, énergétique, sociale, etc.), même les défenseurs les plus acharnés de ce modèle économique global se mettent à dénoncer les « dérapages du capitalisme aveugle » et appellent à une « nécessaire régulation des marchés ». Cette remise en question du système par ses propres architectes contraint donc le mouvement altermondialiste à clarifier ses propres réponses, sous peine de disparaître du débat public.

Enfin, troisième défi, le mouvement ne pourra pas non plus faire l’économie d’une redéfinition de sa relation à la sphère politique. En raison de certaines situations nationales d’abord, où les idées issues du mouvement ont parfois été récupérées voire dénaturées. Mais à l’échelon international surtout, où des gouvernements, notamment en Amérique latine, se réfèrent de façon constante à l’antilibéralisme, obligeant ainsi le mouvement altermondialiste à s’interroger sur la posture à adopter à leur égard.

Vers un autre mouvement ?

La perte de vitesse des Forums Sociaux, constatée un peu partout dans le monde, est le corollaire inévitable de la crise identitaire dont est victime la mouvance altermondialiste. Les Forums ne bénéficient plus de l’effet de surprise de leurs débuts, et ils ont créé des réseaux qui ont désormais un fonctionnement autonome. Si la diversité du mouvement est une force, elle a aussi un prix politique élevé dans la mesure où elle empêche toute prise de position forte et unanime, particulièrement requise en ces temps de crise. Le défi qui se pose est de taille : redéfinir les objectifs du mouvement tout en préservant sa diversité et son unité. « Un autre mouvement » est-il possible ?

Hugo van Brabandt, Oxfam Solidarité
Article publié dans la revue Globo

Photo : Tineke D’haese (Porto Alegre, 2003)

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Un commentaire sur “Quel avenir pour l’altermondialisme ?”

  1. Meta-System Corporation dit :

    Je suis tout à fait d’accord avec cet article même s’il ne reflète plus réellement la réalité…
    Le mouvement alter est loin d’être le seul, il est suivit de près par les mouvements conspirationistes, anarchiste et anciennement communiste…
    De multitudes de groupuscules suivant la même voie sont en train de naître et amènent une forte évolution des pensées…
    La diminution des libertés individuelles ainsi que la dénaturation de l’économie libérale soulèvent de plus en plus de questions auprès du peuple…
    De nombreuses solutions sont en train de naître aussi bien dans les garages que dans les entreprises…
    Il manque toutefois une véritable « idéologie » (même si ce mot est loin de la vérité), ou en tout cas un mouvement global derrière lequel ces personnes pourraient marcher…
    La multiplication d’actions concrètes mais sans « ordonnance » globale nuit clairement à ces mouvements et favorise le discrédit de ces actions face au peuple « légumisé » par une propagande massive…
    Il serait peut-être temps pour le mouvement alter de sortir la bannière et de se battre en front commun face à l’ultra-libéralisme…
    Amicalement
    Sac D’os (Meta-System Corporation)