Les bêtes du sud sauvageFocusReportages

12 décembre 2012

Un film de Benh Zeitlin

Le film « Les bêtes du sud sauvage » revisite l’ouragan Katrina, sous le regard de Hushpuppy, une fillette guidée par la force et le courage des communautés laissées pour compte de la Nouvelle-Orléans. Il s’apparente à un conte moderne, mêlant poésie, réalisme et fantastique.

Hushpuppy, une petite fille de six ans, vit avec son père, dans une baraque de tôles d’une communauté de Louisiane. Son père, sa seule famille, est un homme durci par les épreuves et la maladie qui le ronge. Ils vivent reculés du monde dans un bayou, région humide et marécageuse de Louisiane, coupée de la terre ferme. Cet endroit, Hushpuppy et son père l’ont dans la peau. Ils s’y accrochent, comme à la vie.

En 2005, Katrina, le cyclone le plus meurtrier de l’histoire des Etats-Unis, a tué plus de 1500 personnes en Louisiane. Certains habitants avaient reçu l’ordre d’évacuer, mais nombre d’entre eux n’ont pas pu fuir.

Devant sa maison, la fillette joue avec ses poussins et partage son repas avec son chien. Le Bayou est un monde menacé par la misère. Il inflige un combat quotidien à tous les êtres qui y vivent. Pour rendre cette réalité palpable, le jeune réalisateur new-yorkais, Benh Zeitlin, construit son histoire comme une « Arche de Noé », qu’il filme plan serré après plan serré. Une esthétique qui prend la mesure de la vie qui bat sans relâche, au cœur du bayou.

L’ouragan menaçant la région, des officiels demandent aux villageois d’évacuer. Mais nombre d’entre eux ne peuvent se résigner à quitter leur bassin humide et luxuriant. Avec la tempête, la nature s’emballe, « se casse » et les températures grimpent. Hushpuppy assiste à la fonte des glaciers, à l’eau qui monte et engloutit sa maison. Elle doit résister, survivre, s’adapter. Ce n’est pas nouveau pour elle: depuis sa plus tendre enfance, son père l’éduque « à la dure », comme un homme, pour lui donner toutes ses chances, le jour où il ne sera plus là.

Le lendemain de la tempête, il faut tout reconstruire. Les survivants du village s’organisent et s’entraident, comme ils l’ont toujours fait. Mais les glaciers ont libéré des forces sombres et sauvages, ne laissant la vie qu’aux créatures les plus fortes. Jours après jours, elles gagnent du terrain et se rapprochent du bassin. Telles des gardiennes, la petite Hushpuppy et ses camarades partent à la recherche de la pièce manquante, qui, pensent-elles, rétablira l’équilibre « cassé ». Elles traversent l’océan. En quête d’une mère. D’une page manquant à leur histoire.

Forts de la relation organique qu’ils entretiennent avec leur bassin et la vie dans toute sa splendeur, les habitants gagneront le respect des bêtes sauvages…

Ce film de fiction s’apparente à un conte moderne, mêlant avec justesse la poésie et le fantastique, au réalisme des conditions de vie des habitants de certaines communautés en Louisiane, loin des clichés misérabilistes. Un film vibrant et bouleversant, à ne pas manquer.

* Primé à Cannes, « Les bêtes du sud sauvage » s’est vu décerné le prix de la Caméra d’or qui récompense un premier long métrage.

** Le film « Les bêtes du sud sauvage » a été projeté en avant-première, lors du Prix CinéFemme, remis le 3 décembre 2012 au film belge « The broken circle breakdown »

Delphine Denoiseux

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